Retour sur les chiffres 2024 de l’électrique

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Le marché mondial des véhicules électriques a franchi un nouveau cap en 2024, avec une croissance de 25 % des ventes. Mais derrière cet essor apparent, la réalité est plus nuancée avec de fortes disparités entre continents. De plus, les stratégies varient selon les constructeurs et des incertitudes liées aux politiques publiques perdurent… Alors comment décrypter cette dynamique complexe ? Qui tire son épingle du jeu et quels défis attendent le secteur pour 2025 ? RTA revient sur les chiffres d’une année qui a marqué le marché de l’électrique.

Une croissance mondiale portée par la Chine : faut-il y voir le vrai moteur de l’électrique ?

En 2024, la Chine a confirmé sa position de leader incontesté du marché des véhicules électriques. Le pays représente à lui seul près de 64 % des ventes mondiales, soit environ 11 millions d’unités écoulées. Cette domination n’est pas le fruit du hasard. Elle s’explique par une politique industrielle volontariste, des subventions publiques massives et un écosystème industriel entièrement tourné vers l’électrification.

Concrètement, Pékin a mis en place un arsenal d’aides à l’achat et apporte un soutien actif au déploiement des bornes de recharge, notamment dans les zones urbaines. À cela, s’ajoutent des quotas obligatoires de production pour les constructeurs. Les véhicules électriques sont ainsi devenus accessibles au plus grand nombre, y compris dans les segments d’entrée de gamme.

Parmi les acteurs majeurs, BYD s’impose comme le champion national. En incluant les hybrides, le constructeur dépasse même Tesla en termes de volume de ventes. Au total, BYD cumule 4,27 millions de véhicules vendus en 2024. Cette performance souligne aussi la montée en puissance d’une industrie chinoise désormais capable d’exporter à grande échelle, notamment vers l’Europe.

Une réussite qui soulève néanmoins des interrogations : ce modèle est-il transposable ailleurs ? La Chine peut-elle continuer à jouer ce rôle moteur à long terme sans générer de déséquilibres économiques ou environnementaux ?

Europe : pourquoi le marché ralentit-il malgré l’engouement initial ?

Alors que la dynamique mondiale des véhicules électriques reste positive, l’Europe connaît un essoufflement. En 2024, les ventes ont reculé de 1,3 % sur le continent, un contraste frappant avec la croissance observée ailleurs dans le monde. Cette baisse s’explique en grande partie par la suppression soudaine des subventions en Allemagne, le plus gros marché européen.

Le cas allemand est emblématique. Avec la fin du programme d’aides à l’achat en décembre 2023, les ventes de véhicules électriques en Allemagne ont chuté de 27,4 % en 2024. Pris de court, les constructeurs n’ont pas eu le temps de s’adapter. De leur côté, les consommateurs ont reporté ou annulé leurs achats faute d'incitations financières.

Avec 290 614 véhicules immatriculés, la France affiche une baisse plus modérée de 2,6 %. L’arrêt progressif des aides et les attentes autour du leasing social ont freiné les achats. Pourtant, l’intérêt pour l’électrique reste fort, preuve d’un marché en transition plutôt qu’en déclin.

À contre-courant, le Royaume-Uni affiche une croissance de 21,4 % et 381 970 unités vendues. Ce bond s’explique par une fiscalité avantageuse pour les entreprises, une offre de modèles en hausse et une acceptation culturelle grandissante de l’électrique.

L’Europe traverse donc une phase d’ajustement. Ce ralentissement conjoncturel laissera-t-il place à un nouveau cycle de croissance ?

L’Amérique du Nord : une croissance modérée, mais durable ?

Comment expliquer que l'Amérique du Nord, berceau de Tesla, affiche une croissance plus modérée qu'attendu ? En 2024, les États-Unis ont enregistré 1,3 million de véhicules électriques (VE) vendus, soit une hausse de 7,3 % par rapport à l’année précédente. La part de marché des véhicules électriques est ainsi passée de 7,8 à 8,1 %.

La progression reste largement inférieure aux rythmes observés en Chine ou au Royaume-Uni. Pourtant, les incitations fiscales sont nombreuses. L’Inflation Reduction Act, entré en vigueur en 2022, propose jusqu'à 7 500 dollars de crédit d'impôt pour un achat. Alors pourquoi la croissance semble-t-elle modérée ?

La réponse tient en plusieurs facteurs. D’abord, un réseau de recharge inégalement réparti. Si les zones urbaines sont bien desservies, les régions rurales peinent à suivre. Ce qui freine l’adoption hors des grandes métropoles.

Ensuite, le marché américain reste largement dominé par les pick-ups et SUV thermiques. Un segment que l’électrique peine encore à conquérir malgré des tentatives avec le Ford F-150 Lightning ou le Rivian R1T.

Le Canada suit une tendance similaire. Si la croissance nord-américaine paraît modérée, elle repose néanmoins sur des bases solides. De quoi permettre une accélération future à mesure que l’infrastructure se renforce et que l’offre s’élargit ?


Tesla : la fin d’un règne incontesté ?

Tesla a-t-il perdu son titre de leader du véhicule électrique en 2024 ? Avec 1,789 million de véhicules livrés, le constructeur enregistre une baisse de 1,1 % par rapport à 2023. Il s’agit de la première contraction annuelle en plus d'une décennie. Cette stagnation interroge alors que la demande mondiale progresse.

En Chine, Tesla signe un record avec plus de 657 000 véhicules vendus, en hausse de 8,8 %. Mais cette performance cache une pression concurrentielle intense, notamment face à BYD.

En Europe, la situation est plus préoccupante. En effet, les ventes de Tesla ont chuté de moitié en un an. La fin des subventions, l’absence de nouveaux modèles, la montée en puissance des marques locales et la personnalité controversée du patron Elon Musk font partie des éléments d’explication.

Aux États-Unis, son marché historique, Tesla conserve la première place. Cependant, la concurrence est de plus en plus féroce avec General Motors, Ford ou encore Rivian.

Centré sur le haut de gamme, le modèle de Tesla semble atteindre ses limites dans un marché qui demande désormais des véhicules plus accessibles.

Perspectives pour 2025 : quels défis et opportunités pour le marché électrique ?

2025 s’annonce comme une année charnière pour le marché des véhicules électriques. Plusieurs défis majeurs pointent à l’horizon.

Le premier concerne la fin progressive des subventions à l’achat dans de nombreux pays européens et potentiellement aux États-Unis. Sans ces incitations, les ventes risquent de ralentir, surtout sur les segments haut de gamme.

Le deuxième enjeu concerne la saturation de ce marché premium, alors que des modèles abordables deviennent essentiels pour capter de nouveaux clients. Le développement du leasing social pourrait jouer un rôle clé dans la démocratisation de l’électrique. Il sera reconduit en septembre 2025 en France mais risque d'être malheureusement allégé

Enfin, l’expansion des infrastructures de recharge, avec des initiatives publiques et privées, jouera un rôle clef. Les innovations technologiques, comme l’augmentation de l’autonomie ou la baisse des coûts de production, sont également très attendues.

En conclusion, le marché des véhicules électriques poursuit sa mutation, porté par une dynamique mondiale contrastée. Si la Chine reste le moteur principal, l’Europe ralentit et l’Amérique du Nord avance à un rythme modéré. Longtemps dominant, Tesla fait dorénavant face à une concurrence accrue.
L’année 2025 pourrait être celle du rééquilibrage, avec une offre à adapter aux nouvelles réalités économiques alors que le secteur électrique entre dans une phase de consolidation et de maturité.